Paris #2 Quand Piano et Rogers réinventaient l’espace public

9 septembre 2020

Quand on parle de Beaubourg, on discute encore trop souvent de l’image que ce bâtiment renvoie. Il y a ceux qui aiment et ceux qui n’aiment pas.
Au mieux, ces derniers accepteront le caractère novateur du programme pompidolien de mélanger tous les arts et de le mettre au cœur de la ville. Mais ce sera aussitôt pour s’émouvoir du caractère « brutaliste » de cette « usine » créée par des architectes soucieux de désacraliser l’image du musée.
Ce que l’on oublie trop souvent de souligner, c’est que ce n’est pas le bâtiment qui prévaut dans ce projet. C’est le vide, le vide  qui occupe la moitié de l’espace dans une interrelation profonde avec le bâtiment lui-même.
Ainsi, derrière cette image faussement « brutaliste » se cache probablement l’un des projets les plus urbains de Paris.
A l’emplacement de l’îlot insalubre n°1 détruit en 1934-1936 et où le Corbusier nous promettait les tours du plan voisin, Piano-Rogers nous offrent une des places les plus réussies de Paris.
Aujourd’hui, tout le monde « a pris place » et on ne connaît guère de lieux aussi vivants que ce grand parvis qui descend vers le musée. On pense bien sûr à la piazza del Campo de Sienne. Mais on retrouve, en plus, l’idée géniale de faire de la façade du bâtiment un spectacle permanent avec les allers et venues des visiteurs qui grimpent d’escalator en escalator.
A ceux qui cherchent une date pour évoquer ce retour de l’idée d’espace public dans la pensée urbaine, la piazza Beaubourg (1971-1977) pourrait servir de point de repère de manière beaucoup plus pertinente que les études Loyer, les rues piétonnes où l’invention de ce terme étrange « d’espace public » en 1977 qui en cherchant à les valoriser a réduit la portée de ce qui doit être partout des lieux vivants, ouverts à tous et à tous les usages.
Nombreux sont les architectes qui se sont glissés dans les pas de cette architecture d’apparence décomplexée mais qui en ont en oublié son sens caché. Un plaidoyer inégalé pour que le bâtiment fasse vivre la cité…