Anvers #1 Remettre le jeu au cœur de la ville
Retour à Anvers, place Sint Jansvliet où j’ai mon hôtel. Durant trois jours, on a fait des visites de projets urbains tous très intéressants. Mais ce que j’ai devant les yeux avant de partir chaque matin est finalement presque plus instructif.
La place est de dimensions agréables, bordée de petits immeubles assez étroits. Quelques terrasses en rez de chaussée. Au centre, un grand espace entouré d’arbres.
Sur son côté le plus étroit, un bâtiment donne accès au Sint Annatunel qui permet de traverser la rivière et draine un flot régulier de piétons.
Pas d’aménagements de sols spectaculaires. Bien au contraire, de l’asphalte, tout bête, avec un simple tracé de terrains de jeux et des panneaux de basket.
Une place juste banale. Mais le seul fait de permettre aux jeunes de jouer sans filet, en plein cœur de la ville, change tout et crée une animation permanente du matin jusqu’au soir.
Soudain, cette incongruité nous fait toucher du doigt comment les villes françaises ont été progressivement vidées de « leurs » joueurs.
Les skateurs ont leur skate park, les basketteurs sont cantonnés dans leur gymnase, les footballeurs engrillagés à l’écart (la FFF exige des barrières mêmes en pleine campagne !) et même les vieux pétanqueurs ont abandonné les cœurs de village (les boules ça fait du bruit !) pour pétanquer à l’écart.
Le besoin de tranquillité a tellement pris le pas sur tout le reste que l’on a chassé de nos espaces publics jusqu’aux jeunes et aux vieux qui étaient les seuls disposés à l’investir.
Chacun son chez soi, chacun son espace de loisir, à distance et cloturé, qui ne peut plus sérieusement être qualifié d’espace public.
A quoi bon s’échiner à créer encore des places et des parvis, si on a plus rien à y faire.
Alors, plutôt que de mettre des caméras de vidéosurveillance pour contrôler des lieux sans vie, il serait peut-être plus malin de tenter de réintroduire les « joueurs » dans la ville.